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Le débat sur le CPE
Commentaires de M. Berthelier, président du Conseil de Parents de la FCPE du lycée Jean Moulin

 

Bonjour à tous,

 Nous avons parlé du CPE à notre réunion d’hier au soir à Jean Moulin et sans attendre le compte-rendu qui l’officialisera, je peux dire que tous les adhérents présents se prononcent contre ce projet qui institue la précarité non seulement du travail mais de toute la vie quotidienne des jeunes. Cette position est celle de la Fédération Nationale et de la Fédération Départementale. Nous continuerons à soutenir les étudiants et les lycéens dans leur lutte et la journée annoncée du 28 mars prochain devrait être un nouveau temps fort de notre engagement.

  Comme le CNE, le CPE signe une triple faute :

  Faute politique et sociétale parce qu’on ne peut pas offrir aux jeunes d’un pays en crise démographique -même si la France est moins touchée que ses principaux voisins européens - la précarité permanente et le mépris comme seul horizon. Où est l’estime, où est la reconnaissance lorsque l’on peut licencier sans justification pendant deux ans ? Comment se loger avec un contrat précaire ? Il est vrai que les professionnels de l’immobilier ont aussitôt proposé un contrat de location précaire permettant au propriétaire de se séparer de leur locataire sans plus de justification. Quelle motivation, quel enthousiasme pourrons nous attendre d’un jeune vivant en permanence sous des épées de Damoclès que seront le licenciement et l’expulsion ?

  Faute économique parce que le CPE ne répond en rien aux défis de l’économie et des entreprises. Le manque de compétences tant en termes quantitatifs que qualitatifs est la faiblesse n°1 de nos entreprises et, en particulier de nos PME. L’évolution démographique à court et moyen terme ne va faire que renforcer les tensions sur le marché du travail. Les entreprises ont des défis d’embauche, de renforcement des compétences et de fidélisation que ni le CNE, ni le CPE ne contribuent à relever, par essence si je puis dire. Notons d’ailleurs que les grandes entreprises ne sont pas intéressées par le CPE - le DG d’AXA expliquait hier qu’il ‘embaucherait aucun CPE et le DG de FLO (les restaurants) expliquait la même chose ce matin sur France Inter. Il est vrai qu’il a repris une entreprise où le turn-over atteignait 150 % et qu’il s’est rapidement aperçu qu’il y avait un lien direct entre stabilité de son personnel ce qui implique sa fidélisation et croissance de son CA et de son résultat ! Le mirage du CNE ou du CPE concerne les petites entreprises qui peuvent croire trouver là une source de flexibilité. Elles sont effectivement plus réceptives, mais elles s’apercevront vite du piège. En recourant au CNE ou au CPE, elles seront en difficulté pour assurer leur renouvellement des générations et en faiblesse par rapport aux plus grandes, qui elles, justement joueront l’argument de la fidélisation. Intervenant en PME, je peux assurer que la compétition devient rude pour accéder aux ressources humaines compétentes et que les PME sont déjà handicapées par rapport aux plus grandes, quand elles ne se font pas piller !

  Faute juridique et technique enfin parce que les textes du CNE et du CPE ne sont pas ficelés sur le plan juridique. Les conflits sur le CNE, qui est le plus ancien, se multiplient et les prud’hommes sont saisis sur un nombre croissant d’affaires. En contradiction avec des éléments essentiels du Code du Travail, le CPE connaîtra les mêmes difficultés de mise en œuvre, ce qui devrait décourager nombre de patrons, qui ne souhaitent pas passer leur vie au tribunal et qui ne souhaitent pas non plus pourrir l’ambiance de leur entreprise.

En conclusion, le CPE est une très mauvaise solution à de vrais problèmes économiques et sociaux de notre pays. C’est aussi un choix idéologique contestable puisqu’il s’inscrit dans une volonté de dérégulation et de déconstruction de la puissance publique. La méthode utilisée pour le faire passer (aucune concertation préalable - procédure d’urgence - usage du 49-3) témoigne aussi du peu de considération et de respect de ce gouvernement à l’égard des acteurs économiques et sociaux d’une part et de la jeunesse d’autre part. Pas étonnant dans ces conditions que la crispation débouche sur le confit. J’ose encore espérer que le conflit n’aboutira pas à l’affrontement mais l’autisme des uns - pour des raisons plus politiciennes que politiques - et le désespoir des jeunes qui s’est déjà manifesté lors des manifestations des stagiaires par exemple m’inquiètent. Il est aussi de notre responsabilité d’adulte de montrer aux jeunes qu’il existe d’autres voies que celle de la soumission -flexibilité subie - imposée aujourd’hui par un système économique uniquement fondé sur la rentabilité à court terme (une des causes de la recherche d’une flexibilité toujours accrue et de son transfert des grandes vers les petites entreprises, des entreprises vers le salarié en bout de chaîne), qui est d’ailleurs aussi remis en cause par des dirigeants et des économistes issus de l’entreprise (cf. derniers livres de Patrick Artus, directeur des études économiques à la Caisse des Dépôts, Jean Peyrelevade, ancien dirigeant du Crédit Lyonnais, ...).

La FCPE est fidèle à ses valeurs fondatrices en défendant cette position. Elle est fidèle à sa mission éducative en étant aux côtés des jeunes inquiets face à leur avenir.

Cordialement.

Michel BERTHELIER

 
Publié le mardi 21 mars 2006
Mis à jour le samedi 27 mai 2006

 
 
 
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